La Tension

La Tension – Questionner la présence, provoquer des états de conscience

La présence. Perpétuellement questionnée au sein des arts, et tout particulièrement à travers les propos simultanéistes des avant-gardes historiques, est une notion temporelle et ontologique liée à l’instant, au présent, à l’infini, qui n’a cessé d’être au cœur des recherches depuis le début du vingtième siècle. Expérimentées à travers la performance, la sculpture, l’installation, les arts sonores…

La Tension – Journée d’étude

La Tension – Questionner la présence, provoquer des états de conscience

Mercredi 4 Mars 2020, Strasbourg, HEAR, auditorium (9h30 – 19h) & La Chaufferie à 21h

La présence. Perpétuellement questionnée au sein des arts, et tout particulièrement à travers les propos simultanéistes des avant-gardes historiques, est une notion temporelle et ontologique liée à l’instant, au présent, à l’infini, qui n’a cessé d’être au cœur des recherches depuis le début du vingtième siècle. Expérimentées à travers la performance, la sculpture, l’installation, les arts sonores…

Ces problématiques ont engendré des formes, des concepts, des dispositifs et des actes de compositions qui ont mis en évidence des volontés d’interroger nos affects, nos écoutes et nos réflexions. À l’orée d’une époque et de ses bouleversements multiples, cette journée d’étude sera aussi un temps d’interrogations autour de l’importance des recherches expérimentales dans les arts contemporains.

Une journée d’étude du groupe de recherche Espaces sonores, coordonnée par Yvan Etienne en collaboration avec Joachim Montessuis, Tom Mays et Gérard Starck.


Programme

Journée d’étude – matin (auditorium)
9h30 – Introduction
9h45 – Martin Bakero 
Poésie Acousmantike
10h30 – Carol Robinson
Les subtilités
11h15 – Jean Marc Vivenza
Phénoménologie du son et ontologie métaphysique
12h – Table ronde
12h45 – Pause

Journée d’étude – après-midi (auditorium)
14h15 – Thomas Ankersmit
Perceptual geography: psychoacoustic phenomena and the music of Maryanne Amacher
15h – Elena Biserna
Performances ambulatoires. Réécrire, s’approprier, « présencier » les territoires sonores
15h45 – Véronique Pérriol
Henry Flynt : Une nouvelle musique ethnique à la recherche d’états de conscience
16h30 – Table ronde

Concerts (La Chaufferie)
21h – Carol Robinson / Martin Bakero / Jean Marc Vivenza (diffusion) /  Thomas Ankersmit

télécharger le programme :


Invité·e·s

Thomas Ankersmit
La géographie perceptuelle : des phénomènes psychoacoustiques et la musique de Maryanne Amacher(Conférence en anglais)
Thomas Ankersmit est un musicien et artiste du son qui vit entre Berlin et Amsterdam. Il joue du synthétiseur Serge Modular, en live et en studio, et collabore avec des artistes comme Phill Niblock et Valerio Tricoli. Sa musique, sous labels Shelter Press, PAN et Touch, aux sonorités complexes, et à la puissance électrique brute offre une expérience sonore à la fois spatiale et extrêmement physique. Les phénomènes acoustiques tels les infrasons et les oto-émissions acoustiques (sons émanant de l’intérieur de la tête, générés par les oreilles) jouent un rôle central dans son travail, de même qu’un détournement délibéré et créatif de son matériel.
thomasankersmit.net

Martin Bakero
Poésie Acousmantike
Martin Bakero est un poète sonore aux multiples facettes et provenances. Il s’est toujours intéressé à la poésie, à la musique, l’acte, et la folie, des domaines intimement mêlés dans ses diverses pratiques, qu’il destine toutes à explorer les frontières entre le son et le sens, entre la musique et la poésie. Il s’intéresse à la situation humaine dans l’espace, à comment la vie et l’art peuvent se développer dans l’espace de la voix. Ainsi il a participé dans des recherches en astrobiologie et psychiatrie.
www.therapoetics.org

Elena Biserna
Performances ambulatoires. Réécrire, s’approprier, « présencier » les territoires sonores
Elena Biserna est historienne de l’art et commissaire. Elle est chercheuse associée à l’UMR PRISM (AMU/CNRS) et à l’équipe TEAMeD (Université Paris 8). Ses recherches portent sur l’interdisciplinarité en art, l’écoute, les arts sonores, les pratiques artistiques « situées » et leurs relations aux dynamiques urbaines, aux processus socioculturels, à la sphère publique et politique. Elle a enseigné dans diverses institutions européennes, ses écrits ont paru dans des publications internationales (Les Presses du Réel, Mimesis, Le Mot et le Reste, Errant Bodies Press, Amsterdam University Press, Cambridge Scholar, etc.) et des revues spécialisées.
Elle co-dirige la rubrique wi watt’heure de Revue & Corrigée avec Carole Rieussec, co-organise le séminaire Pratiques de l’écoute, écoute de pratiques à l’IMéRA Marseille et la série La Membrane. Elle a collaboré avec diverses organisations internationales en tant que curatrice.

Véronique Pérriol
Henry Flynt : Une nouvelle musique ethnique à la recherche d’états de conscience
Véronique Perriol est directrice artistique et docteure en histoire de l’art contemporain. Elle s’est spécialisée sur Fluxus et l’art conceptuel et a soutenu, à la Sorbonne en 2006, une thèse ayant pour titre : Conceptions du langage verbal en art. De Fluxus à l’art conceptuel. Elle a publié des textes sur les artistes Fluxus, les artistes de l’art conceptuel et sur la poésie expérimentale. Après avoir enseigné l’histoire de l’art, elle a travaillé en galerie d’art à Paris. Elle se consacre au commissariat d’exposition, à la direction artistique (au sein d’IM) et à l’écriture. Elle est en train d’achever un livre qui porte sur l’œuvre artistique et musicale d’Henry Flynt, mais aussi sur son engagement politique. Actuellement, elle poursuit ses recherches sur l’interdisciplinarité et sur les pratiques expérimentales que cela soit en poésie, en art ou en musique.

Carol Robinson
Les subtilités
Carol Robinson est une compositrice et clarinettiste franco-américaine. Elle se produit dans les grandes salles et festivals internationaux (Festival d’Automne, MaerzMuzik, Archipel, RomaEuropa, Wien Modern, CTM Berlin, Geometry of Now, Crossing the Line, Huddersfield…), et joue avec des musiciens de divers horizons. Férue de l’improvisation, elle collabore régulièrement avec des chorégraphes, des vidéastes, des photographes et des plasticiens de toute sorte.
Auteure d’une cinquantaine d’œuvres, elle a commencé à composer en écrivant ses propres spectacles de théâtre musical qui ont été montés en France, en Allemagne et en Suisse. Dernièrement, elle écrit Mr Barbe bleue, un opéra de poche destiné à un ensemble baroque. Fascinée par les possibilités qu’offre la musique électronique, notamment le traitement en temps réel, Carol Robinson a conçu de nombreuses pièces en la mariant avec des sons acoustiques. Son utilisation des processus aléatoires est une de ses singularités. Trois de ces œuvres électroacoustiques (Nacarat pour guitare électrique, Black on Green pour contrebasse et Les si doux redoux pour cor de basset) sortiront prochainement chez MODE RECORDS à New York. Formée comme musicienne classique, et diplômée du Conservatoire d’Oberlin aux États-Unis, elle vient en France pour approfondir sa pratique de la musique contemporaine grâce à une bourse H. H. Wooley.
www.carolrobinson.net

Jean Marc Vivenza
Phénoménologie du son et ontologie métaphysique
Jean-Marc Vivenza est un essayiste, musicologue et philosophe français. Il fut compositeur, chercheur en électroacoustique et théoricien du « bruitisme futuriste », proposant de nombreux travaux originaux à forte intensité sonore et compositions bruitistes qui ont été présentés sur le plan international entre les années 1979 et 1999. Il s’oriente ensuite vers l’ésotérisme, étudiant notamment le penseur bouddhiste indien Nāgārjuna, l’œuvre de René Guénon, et des auteurs tels que Jacob Boehme.
rotorelief.com


Voir événement agenda de la HEAR

Janneke van der Putten

Artiste en résidence Espaces Sonores 2019-2020

Le Groupe de Recherche Espaces Sonores a choisi l’artiste néerlandaise Janneke van der Putten pour une résidence de deux mois sur les sites d’arts plastiques de Mulhouse (novembre 2019) et Strasbourg (janvier 2020).

voir plus loin -> texte : « Réflexion sur la résidence Espaces Sonores« 

Texte d’introduction à la résidence et bio

« Ma pratique comprend des expériences d’écoute, de performances, de son, de vidéo, de documentations en image / texte / textile, d’ateliers, de projets musicaux et de création de plateformes pour des échanges culturels. Je développe des travaux dans lesquels la relation entre le son, la voix, le chant et le corps, le temps et espace sont investigués par ses expériences personnelles. Les longues promenades, visites guidées et études d’écoute constituent un point de départ important pour son travail. En cela, j’utilise ma voix comme instrument pour analyser et articuler une situation et un espace particulier, permettant ainsi de mettre en avant et de tester les ‘fonctionnalités’ souvent cachées d’un environnement. Je transforme ces expériences en oeuvre sous forme d’installation, composition, texte, vidéo ou encore performance.

L’objectif de ma résidence est de réaliser des performances in-situ qui seront enregistrées dans différents lieux à (et autour de) Strasbourg. Je mènerai des recherches de manière intuitive sur la façon dont l’humain répond aux environnements, architectures et sites naturels. En tissant des liens entre son, espace et temps grâce à la voix humaine et la physicalité du corps, je me plongerai dans le cycle jour/nuit à travers de longues marches, des sessions d’écoute, la contemplation, l’endurance et les capacités de notre corps, de nos sens à percevoir et se relier à notre environnement.
J’invite les étudiants à engager un dialogue en explorant une prise de conscience sensorielle, des processus de création, un savoir historique et local, de même qu’une prise de pouvoir personnelle et citoyenne à travers une approche performative. La voix est l’outil principal, le paysage et l’architecture fonctionnant comme des instruments qui amplifient la source sonore vocale. »

Diplômée d’un Master de Musique au Royal Conservatory & Royal Art Academy, La Haye (2013) et d’un Bachelor de Textile à la Gerrit Rietveld Academy, Amsterdam (2009), Janneke van der Putten est basée à Rotterdam, Pays-Bas. Elle a pu étudier le chant avec Amelia Cuni et Marianne Svasek entre 2009 et 2014. En hiver 2013, Janneke van der Putten était en résidence au Château, Centre international d’art et du paysage, Île de Vassivière. Expositions personnelles inclues: ’All Begins With A’, TENT Rotterdam (2015), ‘Directed to the Sun’ (Quartier am Hafen (Cologne, 2017) et ‘Quitsa’, CINNNAMON (Rotterdam, 2017). En 2019 Janneke étais en résidence à Akademie Schloss Solitude, Stuttgart.

www.jannekevanderputten.nl


Réflexion sur la Résidence Espaces Sonores

Novembre 2019/Mulhouse & Janvier 2020/Strasbourg
Par Janneke van der Putten

Grâce à mes précédents ateliers et performances à la HEAR Mulhouse (Voix et Textile dans le Paysage, 2018) et à la HEAR Strasbourg (Voix et Espace, 2018), j’avais déjà une vision claire de ce que je voulais réaliser sur le terrain durant ma résidence. Je n’allais pas seulement expérimenter, pratiquer et prendre connaissance de la HEAR, ces équipements, ses étudiants et enseignants ; mais j’allais aussi découvrir différents sites qui m’intéressaient à explorer davantage, ainsi que le paysage naturel local et l’histoire de la région. Alors c’était merveilleux de pouvoir approfondir ma pratique artistique en continuation des expériences précédentes.

Au cours de ma recherche artistique pendant toute la durée de ma résidence à Espaces Sonores / HEAR, j’ai suivi un mode de travail collaboratif basé sur les processus dédiés au son de la voix et aux lieux de résonance – où l’architecture interagit avec son propre espace acoustique. Mes interventions performatives provoquaient une reconnaissance du lieu, par la présence et par l’action – comme une célébration qui tenait compte des caractéristiques des lieux en s’y adaptant ; en fonction de leurs cultures historiques, leurs résonances acoustiques, et même leurs situations géopolitiques. J’ai été réceptive aux échanges sur le plan social, et j’ai pu rencontrer beaucoup de personnes de la région et intégrer ces interactions dans la création, provoquant des discussions basées sur l’expérience et la recherche. Ceci m’a aussi amené à développer mon intérêt pour la géographie et les lieux ancestraux – lieux énergétiques, archéologiques et mythologiques. Les actions étaient menées avec la participation des étudiant(e)s de la HEAR et d’autres personnes externes qui se sont intéressées à ma pratique à la suite de mes deux présentations publiques au début de chaque période de résidence. Je les invitais à un dialogue d’exploration de la conscience sensorielle, des processus créatifs, des connaissances historiques et locales, ainsi que de l’autonomisation personnelle et civile à travers une approche performative.

Plusieurs performances collectives se sont réalisées dans les studios, que nous avons filmé et enregistré. Il s’agit de séances de travail non-linéaires, imaginées pour leur sonorités, leurs aspects visuels, leur lumière et leurs interactions chorégraphiques. Elles n’étaient pas rationalisées, et les participants se plongeaient dans les expériences de l’écoute, le toucher, la relation avec l’autre et notre propre corps : parcourant un lac, blindés, mains dans la main ; s’orientant par la voix de l’autre ; criant en haut d’un château d’eau, attendant jusqu’à ce que l’écho s’arrête, et puis criant à nouveau – au rythme de la réverbération. On a fait de l’urbex dans des usines de textile abandonnées; on a exploré des documentations d’architectures monumentales comme un piscine chauffée à l’ancienne avec du charbon; on a fait des interviews avec des scientifiques sur ce phénomène de charbon et de l’archéologie industrielle, avec des conducteurs de la chaufferie au charbon, avec des artistes, des historiens, des archivistes et des professionnels de médiation, avec des artisans de textile et des connaisseurs de techniques textiles anciennes… On a exploré les ruines d’un château médiéval en randonnée sur une montagne mythologique ; on a parcouru un mur païen en circumambulation ; participé avec un groupe de musiciens de rue de Batucada dans la Maison Mimir (voisin de la HEAR), organisé une intervention musicale dans le Parc de la Citadelle…

Enfin, les actions effectuées variaient dans leurs formes et leurs disciplines, utilisant du fil, de la voix, du textile, de la vidéo et de la performance. Leur singularité était l’envie de s’engager dans le contexte local, développant une série de rencontres dynamiques de différents extrêmes et intensités – par l’enthousiasme, l’inspiration et la richesse des informations et des matériaux  présents. J’ai étudié les réponses (humaines) aux alentours de Mulhouse et Strasbourg, ses architectures urbaines et ses sites naturels. En enquêtant sur la relation du son, de l’espace et du temps à travers la voix humaine et le corps physique, je me suis immergé dans le temps cyclique du jour / de la nuit, à travers de longues marches, des séances d’écoute, la contemplation, l’endurance et les capacités de notre corps et de nos sens à communiquer et à percevoir notre environnement. J’ai spécifiquement exploré les possibilités acoustiques et les caractères de sites tels que les usines DMC abandonnées – avec des salles qui permettent des échos très longs, ainsi que plusieurs châteaux d’eau dans la région.

Aussi, en collaboration avec des étudiant(e)s du département de verre, nous investiguons comment un espace de verre peut amplifier le son de la voix – tel un résonateur portable. Nous avons fait plusieurs essais, et les étudiantes ont soufflé différentes formes. Après nous les avons activés dans les studios de la HEAR, qui ont une acoustique réverbérante intéressante. Un autre exemple est la découverte d’un livre de Gérard Léger sur les légendes aquatiques en Alsace (que j’ai trouvé dans la bibliothèque municipale de Mulhouse, à côté de mon habitation de résidence). Cela a motivé quelques excursions, notamment j’ai interviewé l’auteur chez lui à Colmar, mais j’ai aussi emmené les étudiants à quelques sites décrits dans le livre: le Donon, et ensuite, le Lac de la Maix.

Finalement, en profitant de la variété de départements affiliés à la HEAR, j’ai eu la chance de faire plusieurs sessions musicales et d’enregistrements avec Alonso Huerta, étudiant en Ondes Martenot (mais aussi en Création Électroacoustique). Cet instrument de musique est exceptionnellement rare et ses différentes sonorités et les combinaisons possibles avec voix sont frappants. Grâce au support et aux connaissances techniques disponibles dans le studio électroacoustique du conservatoire, un enregistrement ambisonique et un mixe binaural s’est réalisé par Tom Mays de mon solo Cycles: Overtones and Glottis Attack. Autres collaborations étaient entre autres avec la musicienne de cornemuse, Lisa Käuffert, avec qui j’ai enregistré quelques sessions.

Le matériel généré est en processus d’édition envers différentes œuvres, que j’espère pouvoir présenter dans la région. Il y aura aussi une publication audio en format de vinyle prévue au printemps 2023. Des présentations qui ont suivies la résidence sont : 

  • une collaboration avec enregistrement de voix pour le film Quercus, avec la musique par Armand Lesecq; 
  • une performance dans le Inact Festival, Strasbourg; 
  • une participation avec enregistrement binaural dans l’exposition ‘Audiosphere, Sound Expérimentation 1980-2020’ à Museo Reina Sofía, Madrid.

Mes sincères remerciements aux personnes qui ont participé à ma recherche, à l’équipe d’Espaces Sonores, et à toutes les personnes qui ont accompagné et facilité mon séjour à Mulhouse et Strasbourg.